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Publié le 30.05.2022

DRH à temps partagé : vers l’externalisation des RH pour les TPE/PME ?

Auteur

Diplômé de Sciences Po Paris, Emmanuel Guédon a travaillé en tant que RRH et DRH dans des entreprises industrielles ou du BTP telles que Thales ou Bouygues Construction. Il a fondé et dirigé Animis, cabinet de DRH à temps partagé pendant 17 ans, avant de rejoindre le cabinet Atlays comme Managing Director Ressources Humaines. Il intervient régulièrement comme DRH dans des TPE/PME, formateur ou conseil RH de grandes entreprises.

9 % des entreprises privées de moins de 250 salariés font appel à une ressource externe pour gérer leurs sujets RH. D’après la dernière étude Opinon Way lancée en 2022 par Malakoff Humanis, les DRH à temps partagé ainsi que les experts-comptables sont les 2 acteurs vers qui les TPE-PME se tourneraient le plus volontiers afin de gérer les activités RH qu’elles ne traitent pas aujourd’hui.

Parmi les activités que les entreprises seraient enclines à confier à un DRH à temps partagé : l’instauration des nouveaux modes de travail (41 %), le développement des compétences (38 %) ou encore le recrutement et la fidélisation des talents (33 %). Quelle est la vocation d’un DRH à temps partagé ? Qu’apporte-t-il à une TPE/PME ? La crise sanitaire a-t-elle encouragé les entreprises à faire appel à ses services ? Pourquoi ? 

Décryptage avec Emmanuel Guédon, Directeur du département RH d’Atlays, cabinet accompagnant depuis plus de 20 ans les dirigeants d’entreprise.

Quel est le rôle d’un DRH à temps partagé ?

Comme son homologue salarié en CDI et à temps plein, le DRH à temps partagé assume les fonctions d’un DRH de manière assez classique. Ses missions vont du recrutement à la gestion des carrières, des modalités de rupture, en passant par les relations avec les tiers tels que l’inspection ou la médecine du travail, par exemple.

Que peut-il apporter à une TPE/PME ?

Quatre éléments fondamentaux.

La capacité, d’abord, à être à la fois dans l’opérationnel du quotidien (rédaction d’une clause d’un contrat de travail, d’un accord de télétravail etc.), mais aussi à apporter un regard, une philosophie, un recul quant au déploiement d’une stratégie RH globale. Si un client souhaite mettre en place un entretien annuel, le DRH à temps partagé lui proposera, certes, pléthore de supports adaptés à ses spécificités… mais il lui expliquera aussi et surtout quels changements cet outil peut entraîner dans la structure de décision et d’information de l’entreprise.

La faculté à pouvoir benchmarker, ensuite. Parce que le DRH à temps partagé travaille au sein de plusieurs structures, il est en mesure d’apporter des éléments de comparaison à ses clients. Aujourd’hui, la grande majorité des TPE/PME, tout secteur d’activités et métier confondus peinent à recruter. Elles ont donc besoin de se comparer pour mieux se différencier.

« Contrairement à un DRH en CDI cantonné à une seule entreprise, le DRH à temps partagé officie chez plusieurs clients et évolue en équipe, avec des homologues, eux aussi, intégrés à plusieurs structures. »

Lorsqu’une TPE/PME souhaite mettre en place un accord de télétravail, il est en mesure de répondre à ses interrogations quant aux pratiques les plus pertinentes observées sur son marché : quel est le rythme à privilégier ? Mon projet est-il engageant ? Le télétravail est-il autorisé pour les stagiaires ? Dans quelles conditions ?…

Cette ouverture vers l’extérieur permet, également, d’apporter une réelle proactivité à l’entreprise. Ce que le DRH à temps partagé met en place chez un client l’amène inévitablement à réfléchir aux adaptations possibles et personnalisées de tel ou tel projet dans une autre structure.

Enfin, la souplesse est, pour moi, le dernier élément clé attendu par les TPE/PME. L’entreprise peut mettre fin à la prestation d’un DRH à temps partagé quand elle le souhaite. Elle peut, également, faire évoluer la prestation en fonction de ses ambitions et enjeux RH du moment.

L’externalisation de la fonction RH est-elle propre aux TPE/PME ?

Le DRH à temps partagé remplit 2 types de missions.

1/ Assumer les fonctions classiques d’un DRH, mais à temps partiel (quelques jours par semaine ou par mois), et sur une durée indéterminée. C’est ce que nous demande la grande majorité de nos clients qui sont, à 80 %, des TPE/PME, effectivement.

2/ Accomplir, en un temps limité, une mission nécessitant du temps et des compétences spécifiques, dont l’entreprise ne dispose pas à l’instant t. Dans ce cas de figure, nous intervenons pour des  entreprises de taille supérieure, dont certaines sont inscrites au CAC 40.

Le DRH à temps partagé a-t-il vocation à former les équipes pour que les ressources humaines puissent être internalisées ?

Absolument. Cet aspect constitue précisément l’un de nos points forts. Parce que le DRH à temps partagé n’est pas présent en permanence dans la structure, il a besoin de relais internes pour assurer une partie de la mission et transmettre les informations.

« Notre vocation est d’aider ces relais [internes] à grandir et à assumer un éventail de missions de plus en plus large. »

Cela nous permet d’être encore plus efficaces et d’accroître notre valeur ajoutée. Lorsque ces relais internes deviennent autonomes, les entreprises nous confient, en général, d’autres tâches. Nous passons, dans ce cas, d’une mission très opérationnelle, à une mission plus stratégique.

La crise a-t-elle eu un effet sur la demande en DRH à temps partagé ?

Il y a eu, incontestablement, un avant et un après. La crise sanitaire a engendré beaucoup de requêtes concernant la mise en place du télétravail et du management à distance. 

« Lorsque j’évoquais ces notions il y a 3 ans, mes clients n’y croyaient pas. Aujourd’hui, ces considérations sont devenues stratégiques et génératrices d’inquiétudes, entre autres chez les managers les plus âgés. »

Parmi les questions que les TPE/PME se posent : comment gérer une relation de travail à distance tout en conservant un niveau de performance satisfaisant ? Que faire pour préserver un minimum d’incarnation au sein de la structure ?

Le rôle du DRH à temps partagé est de savoir appréhender de façon réglementaire, juridique et culturelle l’ensemble de ces changements de fond qui ne font que s’amorcer. Recréer des événements physiques, aménager les espaces de travail, répondre aux attentes des collaborateurs craintifs quant aux risques de contamination sur le lieu de travail et de ceux qui ont d’ores et déjà tourné la page de la Covid-19 font partie des problématiques sur lesquelles nous travaillons très régulièrement chez nos clients.

L’hybridation de la fonction RH renforce-t-elle le recours à la sous-traitance ?

Je ne crois pas. L’extrême tension actuelle du marché du travail, oui, en revanche.  Le niveau est tel que les TPE/PME sont dans l’obligation de s’interroger quant à leur politique sociale et RH et de faire appel à un niveau d’expertise dont elles ne disposent pas en interne.

Mes politiques de RTT, d’intéressement ou de rémunération globale sont-elles pertinentes ? Comment être mieux-disant pour attirer les talents ? Comment proposer une expérience collaborateur susceptible de retenir les salariés en poste ? Les TPE/PME font appel à la sous-traitance pour bénéficier d’une expérience éprouvée et d’une vision globale du marché.

Certaines activités RH sont-elles plus enclines à l’externalisation ?

Les 2 grands champs d’intervention occupant 80 % du marché RH sont le recrutement et la formation. Au-delà de ça, les TPE/PME commencent souvent par faire appel à un DRH à temps partagé pour répondre à une contrainte exogène telle que la mise en place d’un accord collectif, ou suite à une demande d’ordre réglementaire de la part de son CSE, par exemple.

Faut-il externaliser entièrement la gestion des ressources humaines dans les petites entreprises ?

Pour gérer le quotidien (compliance, paie, disciplinaire…), il est important d’avoir une ressource interne polyvalente. En revanche, plus la politique RH souhaitée est ambitieuse, plus il est pertinent de faire appel à une ressource externe.

Au-delà de l’effectif, c’est le niveau de complexité des enjeux RH qui doit dicter le choix de l’externalisation totale ou partielle. Lorsqu’une petite structure double ses effectifs tous les ans, mieux vaut faire appel à un expert externe habitué à gérer ces caps successifs et ponctuels. Parce qu’il aura rencontré ce type de situations 10, 15, 30 fois, le DRH à temps partagé sera en mesure d’en anticiper les écueils et de mettre en place les process nécessaires pour négocier au mieux ces niveaux de retournement.  Notre crédibilité n’est plus à prouver dans ce domaine.

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