Plus d’une famille sur cinq est monoparentale et 85 % ont a leur tête une femme (insee). Adeline Coumailleau, 34 ans, vit et travaille depuis cinq ans dans les Landes, à Saint-Vincent-de-Tyrosse, et élève seule ses deux enfants. Confrontée aux difficultés de la monoparentalité, elle a créé une association pour favoriser l’entraide entre parents.
Quelle est votre situation actuelle ?
Je suis mère de deux enfants, un adolescent de 15 ans et une petite fille de 8 ans. Je suis séparée depuis six ans de leur père, qui a refait sa vie depuis deux ans. Je travaille comme auxiliaire de vie au sein de ma commune.
Comment faites-vous, au quotidien, pour travailler et élever seule vos enfants ?
C’est compliqué. Mes horaires sont très variables. Je dois être disponible de 8 h à 20 h, du lundi au dimanche. Le principal problème est la garde des enfants. On court partout, on est épuisé, stressé. Et la vie privée finit par empiéter sur la vie professionnelle : on est moins efficace, moins productif.
En avez-vous parlé à votre employeur ?
Bien sûr et cela a été très bien compris. Mais j’ai dû choisir : continuer à travailler normalement pour un salaire à peu près correct ou aménager mes horaires et gagner une paie de misère. Pour élever mes enfants correctement, les garder et suivre leur scolarité, j’ai dû m’adapter et libérer du temps. Il faut savoir qu’il n’existe plus aucune aide pour faire garder un enfant après l’âge de 6 ans !
Comment avez-vous fait ?
Il y a an, j’ai failli craquer quand ma voiture est tombée en panne. Pendant deux mois, j’ai amené mes enfants à l’école et j’ai fait mes tournées chez les personnes âgées à pied. Je n’ai pas trouvé d’aide autour de moi. Alors j’ai décidé de créer un groupe d’entraide : l’association syndicale des familles monoparentales des Landes, intégrée à l’association nationale du même nom.
Combien de personnes vous ont rejointe et qui sont-elles ?
Plus d’une centaine, en moins d’un an. Il y a quelques pères et parents en garde alternée. Mais ce sont surtout des mères seules, des soignantes ou caissières, avec de grandes difficultés de garde. Certaines souffrent d’isolement, mais aussi financièrement Elles ont de gros problèmes d’organisation et n’ont parfois aucun temps pour elles. En plus du sentiment de honte qui peut naître, nous sommes très nombreuses à avoir frôlé le burn out au moins une fois. Mais on ne peut pas se permettre de craquer. Beaucoup se demandent aussi s’il ne serait pas mieux d’arrêter de travailler pour être mère au foyer. Se pose ensuite le problème du retour à l’emploi, que cette situation et en particulier le problème de la garde des enfants rend vraiment difficile.
Quelles formes prend cette entraide ?
Ça peut être du covoiturage, mais aussi de l’hébergement temporaire, des systèmes de garde, des moments de dialogue et d’échange pour sortir de l’isolement, de l’aide matérielle, comme des vêtements pour les enfants, ou de l’aide alimentaire lorsqu’une personne ne peut même plus faire ses courses.
Les choses ont évolué pour vous depuis la création de cette association ?
L’association m’a permis de rencontrer des gens. À côté, j’ai aussi intégré l’équipe municipale de ma ville, en tant que conseillère. C’est tout nouveau, mais j’essaye de me faire connaître auprès des institutions, comme l’Udaf (Union départementale des associations familiales). Pour des conseils sur la monoparentalité et ses difficultés, c’est souvent à moi que l’on demande. J’aimerais aussi reprendre mes études tout en conservant mon emploi. Je vise l’école d’assistance sociale, un diplôme, et peut-être une vie plus correcte, plus sereine pour mes enfants et pour moi.
Bonne pratique
Services d’accompagnement ou de garde d’enfants, assouplissement des horaires de travail… certaines entreprises ont mis en place des dispositifs internes à destination des familles monoparentales.
Orange, par exemple, propose à ses salariés veufs, en instance de divorce ou élevant leurs enfants seuls de les aider dans leurs démarches juridiques, financières ou administratives. Les collaborateurs en situation monoparentale peuvent aussi bénéficier d’un doublement de leurs « autorisations spéciales d’absence ». Pour les salariés en difficulté, les groupes KPMG et Société Générale proposent des places prioritaires dans des crèches d’entreprise, des indemnités de garde ou encore des allocations « études et vacances ».
Quant au groupe Casino, il accorde des aménagements d’horaires temporaires à ses salariés monoparentaux qui peuvent également bénéficier plus facilement de leurs congés pendant les vacances scolaires.
Article rédigé par Alexandre Anquart en partenariat avec le média We Demain.