Depuis 2012, la Fondation Médéric Alzheimer réalise des enquêtes ELDERS (Enquêtes Longévité Dépendance Risque et Soutien). La dernière vague, réalisée au printemps 2020 avant le premier confinement, permet de décrire l’aide apportée à un parent dépendant dont les premiers chiffres clés sont disponibles dans le 3ème baromètre de la Fondation Médéric Alzheimer en partenariat avec Malakoff Humanis. En complément, le groupe de protection social a demandé à la Fondation Médéric Alzheimer d’approfondir la thématique des aidants en emploi. Cette étude se fonde sur une lecture chronologique du parcours de l’aidant et révèle comment une mobilité professionnelle peut permettre une meilleure conciliation aide et travail.
L’étude propose un suivi des dynamiques professionnelles tout au long du parcours de l’aidant.
On ne naît pas aidant, on le devient
Quatre profils sont examinés : les non-aidants, les nouveaux aidants, les aidants confirmés jusqu’aux anciens aidants.
Ces profils sont considérés comme des étapes successives de la vie d’un aidant et non pas comme des profils parfaitement indépendants.
En effet, le parcours des aidants est un parcours qui s’inscrit dans le temps. Cette chronologie correspondrait à l’intensification de l’aide apportée en réponse aux besoins accrus des parents aidés.
L’étude révèle que plus on s’avance vers le statut de l’aidant confirmé et mieux on gère les difficultés.
Il existe une résilience des aidants qui se perfectionnent avec l’âge. Ainsi, les « aidants confirmés » ont de moins en moins de difficultés à se concentrer.
En 2017, 16 % d’entre eux déclaraient avoir des problèmes de concentration, en 2020, ils ne sont plus que 11 %. Ils sont également moins nombreux à passer du temps au téléphone (22 % en 2017 contre 16 % en 2020). Sur le plan des interactions sociales, les aidants confirmés parviennent à avoir une vie sociale et du temps pour eux. Alors que 38 % déclaraient dîner au moins une fois par mois avec des amis en 2017, ils sont 42 % en 2020 avant le premier confinement du mois de mars. 44 % en 2017 déclarait pratiquer une activité pour soi. Ils sont 48 % en 2020.
Néanmoins, la vie des salariés aidants même confirmés est loin d’être un long fleuve tranquille notamment lorsque les aides s’intensifient.
Aider et travailler, mission possible mais pas simple à gérer
Selon l’étude, 60 % des aidants concilient aide et activité professionnelle. Les salariés aidants occupent souvent des postes avec des responsabilités managériales.
En effet, ils sont en moyenne 37 % à être manager, contre 33 % chez les non-aidants.
Aider et travailler, c’est possible mais à quel prix ?
L’étude révèle, en effet, que l’activité professionnelle ne vient pas automatiquement empêcher l’aide. Les salariés aidants parviennent à mener de front ces deux activités. On apprend que les salariés aidant assument autant de tâches effectuées que les aidants sans emploi.
En revanche, on constate que les salariés aidants ne peuvent assumer aussi fréquemment certaines aides. Ce sont souvent des tâches chronophages comme la présence de l’aidant auprès de son proche ou certains soins personnels.
Ainsi, 13 % des salariés aidants déclarent avoir fréquemment des difficultés à concilier travail et obligations familiales. 13 % ont d’ailleurs pris des congés spécialement pour s’occuper du proche dépendant.
Ses difficultés sont à comprendre en fonction de l’évolution du parcours de l’aide.
En effet, au début, la charge est limitée et plus facilement conciliable avec l’activité professionnelle de l’aidant.
Mais plus le temps passe, plus les aidants doivent s’investir dans le soin de leurs parents. Les besoins des personnes âgées suivent une dynamique qui intensifie les besoins et donc leur réponse en termes d’aide apportée par leurs enfants devenus adultes.
Ces derniers peuvent passer d’un rôle d’aidant mensuel à un aidant hebdomadaire puis quotidien.
En résumé, plus ces soins deviennent intenses, plus la charge mentale se fait ressentir. C’est pourquoi entre 2017 et 2020, le sentiment de devoir être joignable en permanence s’est intensifié chez les sondés, passant de 47 % à 74 %.
Allo ? Cherche entreprise aidante
Pour concilier travail, aide et bien-être personnel, la flexibilité est indispensable. C’est pourquoi les salariés aidants sont nombreux à changer d’emploi en se tournant vers des postes facilitant leurs deux activités. Ainsi, 54 % des sondés déclarent être prêts à évoluer dans leur vie professionnelle pour aider un parent.
La mobilité professionnelle est conçue comme une stratégie pour mieux concilier aide et travail. Être aidant reste encore un tabou dans l’entreprise pour 78 % d’entre eux qui ne se déclarent pas aidant auprès de leur manager. Ainsi, pour éviter de lever le voile sur leur rôle et par crainte de la stigmatisation, les salariés aidants n’hésitent pas à changer de poste et d’entreprise.
Mais cette mobilité professionnelle ne signifie pas qu’ils renoncent à leurs carrières. 43 % d’entre eux ont des responsabilités contre 31 % chez leurs homologues qui n’ont pas changé d’emploi. Leur profil : jeunes cadres dynamiques. Ce sont, en effet, en grande majorité des csp+ qui évoluent dans le bassin parisien.
Ces derniers ne renoncent donc pas à leur carrière professionnelle et pourtant ils améliorent leur bien-être au travail grâce à une meilleure conciliation vie pro et vie personnelle.
Alors qu’en 2017, ils étaient 20 % à mentionner des difficultés à concilier leur vie professionnelle avec leurs obligations familiales ; ils ne sont plus que 14 % en 2020. 55 % d’entre eux parviennent à ne jamais travailler le soir contre 49 % en 2017.
Cette meilleure conciliation est permise par la politique d’aidant friendly mise en place par les entreprises.
La comparaison des dispositifs en faveur des aidants mis en place dans l’entreprise de départ et d’arrivée montrent des signes d’amélioration. Les entreprises initiales étaient particulièrement dépourvues de tels dispositifs, à la différence de l’entreprise d’arrivée. L’étude révèle que 59 % des salariés aidants qui font évoluer leur carrière, quittent des moyennes entreprises pour rejoindre de très grands groupes qui ont très certainement mis en place des politiques volontaristes d’accompagnement.
Les entreprises ont donc tout à y gagner de mettre en place une politique d’aidant friendly pour attirer et préserver des salariés aidants qui constituent par leurs expériences de vie un atout pour la performance sociale et économique.
Données recueillies par Kantar Public entre mars et mai 2020, auprès d’un échantillon de 6 531 répondants représentatifs de la population française âgée de 40 à 79 ans.
Pour aller plus loin
Pour mieux accompagner les salariés aidant dans leurs démarches administratives ou du quotidien, Malakoff Humanis a créé la Ligne Info Aidant qui permet, grâce à l’aide des conseillers experts de mieux connaître les droits de congés, les services d’aide à domicile possibles ou encore les solutions d’hébergement.